La lauze

Carrière de lauzes au Ron des Fades


La lauze = la plaque de pierre dont on se sert pour couvrir les toits. Ce type de couverture fut et reste très répandu en France, mais aussi en Espagne, au Portugal, en Albanie, en Grèce, en Bulgarie : dans les Alpes, l’Himalaya, les Balkans…

Le mot lauze ne se réfère pas à la qualité du matériau mais à sa fonction.

Dans le Massif Central, on trouve une lauze de nature volcanique, la phonolithe, aux sources de la Loire, en Velay, dans le Cantal.

La lauze est calcaire dans les Causses (Larzac, Causse Méjean), en Périgord (à Sarlat).

La lauze est de schiste dans les Cévennes : le Gard , l’Ardèche, la Lozère ; plus rarement elle sera de grès et peut–être encore d’autres matériaux,vu l’immensité de la zone de répartition.

Le dictionnaire français a retenu le mot lauze, lause, mais la prononciation varie suivant les régions et l’on trouve le mot laouv (lave) en Bourgogne.

Le lieu où l’on trouve les lauzes s’appelle une lauzière en Haute-Loire par exemple (cf. la lauzière du lac bleu), ou la lauzeire ; le nom le plus représentatif est la Lozère (l’endroit des lauzes) .

Les lauzeurs
TOIT DE LAUZES OU TOIT EN COUVERTURE DE PIERRE

Il s ‘agit d’un savoir ancien, pratiqué sur une très vaste aire géographique, sous les climats les plus divers, avec des matériaux de qualités différentes.

Les variantes de cette technique artisanale sont donc infiniment nombreuses,sans compter les apports contemporains qui en augmentent les possibilités.

On peut organiser ce savoir autour de deux principes :

  • Ou bien les lauzes sont tenues, par chevilles généralement, ce qui permet de leur donner une forte pente. La technique de pose de l’ardoise est une version normalisée, industrialisée, de ce savoir.
  • Ou bien les lauzes sont posées ‘en charge’, comme sur le plateau du Larzac, ou chez moi, en Cévennes d’Ardèche.

Les premières rangées de lauzes prennent appui sur le mur et la rangée suivante sur la précédente, ce qui oblige à choisir une pente plus faible : chez moi, pour un toit à pente générale de 45 degrés, les lauzes sont posées à environ 22 degrés.

Elles reposent à l’arrière sur un plancher de bois, soutenu par une forte charpente, ou sur une voûte dans le cas d’une église ou d’une chapelle.


TECHNIQUE TRADITIONNELLE DE LA POSE DES COUVERTURES EN LAUZES DE SCHISTE DANS LA VALLÉE DE LA DROBIE

C’est la technique dite de la ‘pose en charge’.

Les dalles de pierre reposent sur un plancher, lui-même reposant sur une forte charpente, tout cela en châtaignier ; le poids est estimé à 250 kg le m2.

Les églises et les chapelles n’ont pas de charpente mais une voûte en général.

Les lauzes sont posées sur un mortier sablo-argileux que l’on étale sur le plancher et qui, en séchant, les emprisonne et les empêche de glisser.

Autres avantages de ce mortier : lors des violentes tempêtes, il évite que la pluie, poussée par le vent, remonte la pente des lauzes ; et il est aussi un isolant. Le sable argileux a été passé au crible pour en évacuer les gros agrégats.

Le travail de construction commence par un tri et un calibrage des lauzes : c’est la phase la plus importante.

La couverture va être posée en bandes discontinues, la bande de lauzes la plus large est en bas au départ du toit ; les bandes vont aller en diminuant progressivement jusqu’au faîtage.

Chaque artisan a son calibrage personnel : je fais des bandes qui diminuent de 3 cm en 3 cm. Une bande est constituée de lauzes ayant une même dimension, à plus ou moins 3 cm dans le sens de l’évacuation de la pluie.

Le travail de classement consiste à faire des paquets de lauzes correspondant à la largeur de la bande où elles vont être utilisées. On vérifie qu’elles ne sont pas fêlées, poreuses, et si nécessaire on fait un peu de taille au marteau.

Le bord inférieur de la lauze, pour mieux sortir l’eau de pluie doit si nécessaire être émincé. La largeur de départ de la première bande varie suivant la taille des lauzes que l’on a : dans certains cas, on peut commencer avec des bandes très larges de plus de 60 cm, et on finit en général à moins de 20 cm.

L’épaisseur des lauzes varie aussi, les plus grandes en surface sont souvent les plus épaisses. Les premières rangées qui portent sur le mur ont souvent plus de 5 cm d’épaisseur, on les appelle des bars. Il est essentiel de débuter la première rangée avec la bonne inclinaison, car c’est elle qui va guider jusqu’au faîtage. Ce n’est pas si facile de trouver le bon angle : d’ailleurs, quand c’est possible, en cas de restauration, il est judicieux de conserver la première rangée de l’ancien toit.


Et l’on continue jusqu’au faîtage du toit quand on a épuisé la bande la plus large, on continue avec l’immédiatement inférieure (dans mon cas, celle de 3cm de moins).


Il faut couvrir progressivement les deux côtés du toit, car c’est très lourd et ceci afin de déséquilibrer la charpente.

Il sera certainement nécessaire de glisser parfois des éclats de lauzes pour les caler afin qu’elles ne tanguent pas.

Le faîtage,dans les hameaux du bas de la vallée de la Drobie, était traditionnellement réalisé grâce aux fameux ‘papillons’ (parpailloux) , tandis qu’à partir de Sablières, le faîte devenait différent.



Les papillons s’encastrent les uns dans les autres, ce qui rend l’ensemble solidaire et les forts vents n’ont pas prise sur le toit. L’on peut commencer le faîte du toit par un demi papillon. Dans ce cas , il faut le lester en coinçant une pierre entre les ailes avec le suivant.

Sur les rives, on fait dépasser les lauzes, suivant les dimensions, de 15 à 20 cm.

Dans certains hameaux, elles ont le bord façonné, mais ceci n’a qu’un but esthétique.



Quant au débord de départ du toit, il connaît de nombreuses variantes :
  •  La plus simple : l’aplomb de la deuxième rangée doit dépasser du mur pour que l’eau au joint ne rentre pas dans celui-ci.
  • Ma préférée : Une rangée dépasse du mur. La première rangée se pose dessus à 22 degrés, ce qui permet facilement d’augmenter le débord du toit de 10 cm et plus. L’on peut aussi faire dépasser le plancher du toit avec le principe dit des corbeaux.

Le toit peut être plus complexe que les deux pentes, mais je conseille de débuter par de petites surfaces simples et, une fois bien assimilés les principes, il devient aisé de s’attaquer à des formes plus élaborées.

La meilleure des écoles ? ....Observer comment les anciens ont opéré…